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Méditerranée

«Ocean Viking» : solidarité bloquée sur le quai des bulles

Le navire est toujours retenu en Sicile par les autorités italiennes. Le bédéiste Hippolyte, qui devait prendre place à bord jusqu’à la fin août, raconte la situation sur place.
par Léa Masseguin, Dessins Hippolyte
publié le 6 août 2020 à 20h01

En Sicile, Porto Empedocle est au bord de l'asphyxie. Les migrants et demandeurs d'asile, originaires d'Afrique subsaharienne pour la plupart d'entre eux, continuent d'affluer vers la commune de 17 000 habitants. Les touristes ont déserté. Seule une grande tente blanche installée par les autorités locales surplombe le port, où est immobilisé l'Ocean Viking depuis début juillet. Jusqu'à mardi soir, plus de 300 personnes s'entassaient dans la structure, avant d'être dispatchées dans d'autres centres de l'île.

«On assiste à des va-et-vient incessants, y compris la nuit, de ferries qui évacuent des migrants de Lampedusa à Porto Empedocle. On m'a raconté que des pêcheurs avaient déjà retrouvé des corps dans leurs filets», explique Hippolyte. Le bédéiste devait prendre place à bord de l'Ocean Viking, mais les autorités italiennes en ont décidé autrement. Depuis, il est devenu le témoin oculaire d'un quotidien devenu intenable. «Les migrants restent toute la journée dehors, sous une chaleur étouffante. Ils utilisent leurs couvertures de survie pour se protéger du soleil», relate-t-il. Fin juillet, une centaine de personnes avaient réussi à franchir la clôture et s'échapper du camp. Une situation qui provoque le ras-le-bol de la population locale et qui alimente la xénophobie. «Les flux migratoires sont incontrôlés et illégaux», «Notre santé est en danger», pouvait-on lire mercredi sur les pancartes de manifestants. En Italie, plusieurs dizaines de migrants ont été testés positifs au Covid-19 après avoir débarqué de bateaux autonomes.

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Sur l'Ocean Viking amarré, Baptiste, Gavino, Luisa, Matt et Julia mettent les bouchées doubles pour reprendre le large au plus vite. Gilets de sauvetage, médicaments, stocks alimentaires… Ils ont réuni le matériel nécessaire pour être autonome en mer durant trois mois. Les dix membres du personnel à bord (Hippolyte, 3 autres Européens et six Philippins) sont sur le pied de guerre. Les marins philippins, eux, n'ont même pas pu poser le pied sur le sol européen depuis l'immobilisation de l'Ocean Viking, en raison des restrictions sanitaires. Hippolyte l'assure : «Une fois qu'il pourra repartir, le navire sera plus irréprochable qu'irréprochable.»

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