Le volet du plan de soutien à l’économie japonaise consacré à l’agriculture met l’accent sur l’élevage, le maraîchage et les productions à haute valeur ajoutée fortement pénalisées par la chute du tourisme et des exportations vers les autres pays d’Asie. Il prévoit également des mesures pour pallier le manque de main d’oeuvre dans le secteur agricole et agro-alimentaire.

Dans le cadre du plan de soutien à l’économie annoncé par le Premier Ministre Abe le 7 avril 2020, l’agriculture, secteur structurellement fragile et fortement soutenu par les pouvoirs publics, bénéficie d’un budget additionnel de 544 MdsJPY (4,5 Mds€). Celui-ci vient s’ajouter au budget 2020 du ministère de l’agriculture, de la forêt et des pêches (MAFF) de 2410 MdsJPY
(17 Mds€), déjà en hausse de 0,8% par rapport à 2019 pour faire face à l’épidémie de peste porcine classique et surtout à l’éventualité d’une contamination par la peste porcine africaine qui sévit dans les pays voisins.

Les premiers effets de la crise ont été ressentis dès le mois de février sur les produits agricoles haut de gamme à destination des restaurants au Japon et dans toute l’Asie.

En particulier, le boeuf japonais de type wagyu dont la viande persillée est très prisée en Asie a vu sa cotation chuter de 15 à 20%. Certains fruits très coûteux (variétés de melons, etc) ou thés connaissent la même tendance, ne trouvant plus preneurs sur le marché national, auprès des consommateurs locaux ou des touristes, ni à l’exportation (-11% d’exportations de produits agricoles en février 2020 par rapport à 2019).

Pour compenser la fermeture le 2 mars des écoles et cantines qui accueillaient 12,3 millions d’élèves, un premier train de mesures a été mis en place dès le 10 mars, sur les budgets du ministère en charge de l’éducation (MEXT), du MAFF et via la Japan Finance Corporation. Certains agriculteurs et quelques industries agro-alimentaires, fournisseurs des cantines scolaires, ont été indemnisés pour donner leurs produits aux banques alimentaires ou les écouler comme fertilisant ou aliment du bétail. Les frais de stockage dans l’attente de nouveaux débouchés ont été pris en charge, de même que des investissements en
équipements ou en formations destinés à améliorer la sécurité sanitaire des produits. Enfin, 2,3 MdsJPY (19M€) ont permis de compenser les pertes des éleveurs laitiers liées à l’arrêt de la distribution de lait dans les écoles.

Aujourd’hui, comme beaucoup de pays, alors que la consommation alimentaire est seule à se maintenir, voire à croître, le Japon doit faire face à deux difficultés majeures

  • Le manque de main d’oeuvre en agriculture comme dans les industries agroalimentaires (IAA) suite à la fermeture des frontières aux pays voisins (Chine, Corée, Vietnam en particulier) qui ne permet plus l’arrivée de main d’oeuvre immigrée, de la garde des enfants déscolarisés et enfin de la crainte de contamination des agriculteurs et des employés des IAA ;
  • La réorganisation des chaînes d'approvisionnement perturbées par le retour massif vers les repas à domicile et les commerces de proximité alors que les citadins japonais sortent très volontiers en temps ordinaire.

Le plan massif de 544 MdsJPY (4,5 Mds€) publié le 7 avril poursuit plusieurs objectifs :

  • Soutenir la production nationale (produits laitiers, fruits, légumes, etc) qui doit continuer d’approvisionner au mieux les commerces alimentaires alors que la consommation à domicile redevient majoritaire, en particulier à Tokyo et dans les 6 autres préfectures concernées à ce stade par l’état d’urgence ;
  • Porter l’effort sur les filières à haute valeur ajoutée (viande de type wagyu , certains poissons et produits de la mer, fruits haut de gamme, etc) en vue de la réouverture de la restauration de luxe au Japon, très prisée des touristes asiatiques mais aussi dans le reste de l’Asie avec la reprise des exportations. L’horticulture et le thé entrent également dans cette catégorie des productions à haute valeur ajoutée.

Peu détaillées à ce stade, les principales mesures concernent le soutien aux productions les plus en difficulté à hauteur de 190 MdsJPY (1,6 Md€), en particulier la viande de boeuf wagyu dont des aides au stockage chez les grossistes, des campagnes de promotion en sortie de crise. 45 MdsJPY (380 M€) sont dédiés au secteur laitier sous forme de soutien aux éleveurs et à la transformation ainsi qu’au stockage du lait en poudre. Les secteurs du maraîchage, du thé, de la pêche, du bois et l’horticulture sont inclus dans le plan. Des mesures transversales telles que des subventions à l’achat de semences et plants et à la location d’équipements ainsi que des prêts à taux réduits sont également prévues.

6 MdsJPY (1,6 Md€) sont affectés à la mobilisation des élèves des lycées et collèges agricoles pour pallier le manque de main d’oeuvre.

Le secteur bénéficiera en outre d’aides du METI aux PME et à l’exportation tandis que l'expansion sur le marché national comme à l'étranger des boissons alcoolisées japonaises fera l’objet d’un soutien accru du ministère des finances.